NOTE : Cet article contient des gifs plutôt lourds. Il s’agit de vidéos de mon propre PC, témoins du bon fonctionnement de ces (gros) titres sous Linux. Désolé si cela ralentit le chargement de votre page, c’est pour la bonne cause.
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On le dit, on le sait, on ne peut pas jouer sous Linux. Lors de ma première installation de Xubuntu, alors que j’étais encore au lycée, j’ai bien compris que je devrais faire une croix dessus. Mes seules solutions pour jouer étaient désormais ma Playstation 2 ou ma Gameboy Advance SP.
Nous sommes en 2019, et à l’heure où j’écris ces lignes, un ensemble de 6 articles est sorti [1], largement diffusé par le Journal du Hacker [2], pour expliquer comment configurer sa souris RGB et son clavier mécanique RGB sous Linux, constructeur par constructeur, voire modèle par modèle, et aller jusqu’aux jeux disponibles sous Linux et les moyens d’en profiter voire de les streamer.
Pour ma part, mon clavier est signé Madcatz, ma souris est une Razer Naga, et je n’ai jamais eu besoin d’autre chose pour les faire fonctionner qu’une prise USB alimentée. Xubuntu [3] ne m’a jamais rien demandé d’autre. J’utilise les 12 boutons latéraux en jeu, les clics fonctionnent, et les raccourcis pour gérer le son sur mon clavier réagissent à fond les ballons. Même mieux : il est assez simple de faire fonctionner une manette Xbox 360 sur Xubuntu, c’est très bien documenté !
Donc, on sait faire marcher un clavier, une souris, une manette.
Je disais donc avoir fait une croix sur le gaming en abandonnant Windows (et accessoirement ma télé, exit donc les Playstation, Xbox ou Switch). Mais moi, j’aime bien jouer. Je suis mauvais, je n’ai aucune patience, mais j’ai suffisemment regardé 3615Usul, le Joueur du Grenier ou Game Spectrum [4] pour savoir qu’il ne s’agit pas d’un objet débilitant pour ado arriéré, mais d’une culture à part entière avec une richesse et une variété notables. J’ai également suffisemment regardé de streams de plusieurs heures pour savoir qu’une histoire peut me happer ou un gameplay me passionner. J’ai enfin suffisememnt ragé sur League of Legends, bondi de peur devant 5 Night’s at Freddy ou ri devant Portal pour savoir que j’aime ça. J’ai même perdu du temps sur Hearthstone !
Sauf que ces jeux, là haut, je les faisais tourner dans l’immense majorité des cas sous Windows. Une exception pour League of Legends qui a un temps accepté de rouler sur un PC trop à la traîne pour lui avant que Riot n’estime que Linux était synonyme de triche.
Pour jouer, il fallait bricoler dans la plupart des cas, avec l’aide d’outils comme PlayOnLinux [5] ou encore Lutris [6]. Pas terrible, loin d’être accessible. En décembre 2013, SteamOS a commencé à se démocratiser. Le plan de Valve était simple : proposer Steam sous Linux, avec des jeux compatibles. On peut critiquer Valve sur plein de points, ne serait-ce que ses DRMs et la mort du marché d’occasion, pierre angulaire du jeu vidéo. On ne peut cependant pas leur enlever qu’avant (presque) tout le monde, Steam a émis la volonté et s’est donné les moyens de pousser le gaming sur Linux.
J’ai dans ce cadre pu (et peux encore) jouer à des titres tels que Portal (et Portal 2) ou encore Saint’s Row IV. Les petites bêtes tournent comme sous un Windows sans broncher, je n’ai rencontré que très peu de mauvaises surprises. Dans ce même cadre, j’ai pu m’essayer à d’autres jeux, indépendants, comme Blackhole ou encore The First Tree. Les jeux indépendants compatibles nativement avec SteamOS sont nombreux. Mais des gros titres, comme le rogue-like spacial Everspace sont également disponibles et fonctionnels. Et doit-on parler de Left 4 Dead 2 ?
Et c’est là que je veux en venir : en été 2018, Steam a poussé le concept encore plus loin en créant un WINE (outil utilisé de longue date pour faire tourner des softwares Windows sous Linux) adapté à sa bibliothèque de jeu, afin de plus ou moins automatiser l’adaptation de ceux-ci sous Linux : Proton [7].
Proton s’installe très simplement (en tout cas sous Xubuntu), et n’a même pas besoin du driver recommandé pour exploiter votre carte graphique correctement. On m’avait offert Hellblade sur Steam, et je ne pouvais pas y jouer sur mon laptop, incapable d’apporter les ressources nécessaires. J’ai alors testé de faire fonctionner le jeu avec Proton, et… … ce fut un succès immédiat !
Mon PC ne pouvait clairement pas suivre, mais ça fonctionnait. Alors j’ai pris sur moi : si le gaming ne me fermait plus la porte, j’allais la défoncer. Je me suis construit une nouvelle tour, ne gardant de son ancêtre que le disque dur. Et voici que tout fonctionne sans ciller :
- Ryzen 5 1600
- MSI X370 Gaming Carbon Pro
- GTX 1060 3G
- 16Gb de DDR4 Corsair
Je suis un papa tellement fier <3 !
Et il est 100% Linux. Pas de dual-boot : je n’en ai pas besoin pour jouer !
Ce n’est pas encore le PC du siècle, mais ça correspond largement aux standards pour les jeux du moment. Et je lance Hellblade, et que ne voilà pas que je parcours le jeu de bout en bout. Et je démarre Dishonored, et il tourne en Ultra sans pleurer. Son frère, le n°2, le suit de peu (j’ai quelques bugs graphiques, sans doute parce que je n’ai pas pris sur moi d’installer la dernière version du driver Nvidia).
Je n’ai croisé aucun jeu me refusant l’accès à son univers : Skyrim tourne parfaitement en qualité maximum, et j’en suis à 27h de jeu sur The Witcher 3.
Il a longtemps été raisonnable d’affirmer que la passion du gaming empêche un passage à Linux. Ce ne sera bientôt plus le cas, bien au contraire. Vous en doutez ? Même GOG, une autre plateforme d’achat de jeux (sans DRMs et avec plus d’éthique) a annoncé qu’elle allait s’y mettre [8] − cela dit ça ne bouge plus trop. Proton va peut-être relancer la team, la compétitivité fait des miracles en termes de motivation.
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Re-NOTE : j’ai tooté il y a quelques temps que je rencontrais des problèmes de freeze aléatoire. Je n’ai aucune idée d’où cela vient, mais je ne considère pas qu’il s’agisse d’un argument en défaveur de ma position à travers cet article. Simplement parce que je semble être le seul (ou presque) à rencontrer cela, et qu’il y a fort à parier que le coupable se trouve ailleurs que dans le gaming en lui-même.
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Ces articles sont disponibles sur le blog https://linuxevolution.wordpress.com/ ↩︎
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Oui, alors, j’utilise Xubuntu, parce que le X et le U, ça fait UX, et que je crois en l’User Xperience. Plus sérieusement, je ne tiens pas à débattre de mon choix de distribution. Je pense d’ailleurs que le mépris de beaucoup envers (x)Ubuntu est injustifié et élitiste, mais je garde ça sous le coude, hein. ↩︎